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La diversification de la formation professionnelle : former et se former aujourd'hui et demain

Pour une entreprise, la diversification signifie l'élargissement de la gamme des activités et/ou des marchés auxquels elle se consacre (ANSOFF et MCDONNEL, 1989). Ce qui est divers est donc ce qui est différent, mais aussi pluriel. Il s'agit à la fois d'un déploiement, à partir d'un état initial qui contient a priori le potentiel du tout, et d'une différenciation de cet état initial qui en comprend pourtant toujours des traces.    

A cet égard, la diversification de la formation professionnelle implique plusieurs processus qui constituent à la fois un déploiement et une différenciation de la formation. Ces phénomènes illustrent les caractéristiques de la complexité telles qu'Edgar Morin nous les livre dans l'ensemble de son œuvre : le tout est à la fois plus et moins que la somme de ses parties. De même, ce qui est complexe est à la fois irréductible, imprévisible, produit et producteur, et auto-éco-organisateur. On assiste ainsi à la multiplication des certifications, titres et diplômes, à certains changements dans les modalités de certification, dû au transfert des certifications vers le secteur privé, à l'invention de nouveaux modèles économiques pour la formation, à la conception d'approches pédagogiques différentes, à la prise en compte d'autres publics, à l'exploration de terrains de la formation jusque là laissés en friche, à la mobilisation de modalités et d'outils de formation innovants, à l'observation de métiers de la formation renouvelés, à la mise en œuvre de méthodes d'accompagnement inédits... Ces considérations interrogent sur la façon dont les mondes de la formation font face à l'incertitude. Afin de structurer nos analyses, on peut considérer que la diversification de l’offre de formation concerne trois niveaux de la formation : le premier concerne l’Etat, par la diversification de l’offre de formation globale sur le territoire. Le second niveau concerne les centres de formation, qui ouvrent leur catalogue à de nouvelles sources de certification. En lien avec les éléments précédents, la diversification concerne également les modalités de la formation d’un point de vue pédagogique, impliquant à la fois les savoirs, les intervenants et les publics formés. 

Nous faisons l’hypothèse pour ce colloque de différentier l’offre de formation à travers trois niveaux de la formation : le premier concerne l’Etat, par la diversification de l’offre de formation globale sur le territoire. Le second niveau concerne les centres de formation, qui ouvrent leur catalogue à de nouvelles sources de certification. En lien avec les éléments précédents, la diversification concerne également les modalités de la formation d’un point de vue pédagogique, impliquant à la fois les savoirs, les intervenants et les publics formés. 

 

L'Etat

L’offre de formation professionnelle n’a jamais été aussi conséquente en France : diplômes de l’enseignement supérieur, diplômes d’Etat, certificats de qualification professionnelle de branche, titres professionnels que tout organisme peut proposer à l’enregistrement auprès de la CNCP, modules qualifiants, professionnalisants, diplômants… A quoi est due cette recrudescence ? A une politique délibérée ou à un emballement du processus d’habilitation des formations ? Quelles en sont les conséquences pour les candidats et pour les acteurs de la formation eux-mêmes ?        

La décentralisation de la certification a permis aux institutions de se libérer des contraintes techniques, administratives et financières de l’organisation des formations et de leur certification. Aujourd’hui, elles ont pour responsabilité la répartition de l'offre de formation sur le territoire, elles délivrent les habilitations et agréments et en évaluent les organismes délégués. Quels sont les moyens de réflexion dont ces institutions devraient se dotées ? Pour quels effets ? Quels sont leurs points aveugles et comment y remédier ? Quels appuis peuvent-ils trouver chez les experts ? En ont-ils les moyens ?

 

Les centres de formation

Dans le même temps, beaucoup d'organismes de formation font face à une baisse de leur activité consécutivement à la baisse des financements et à l’accroissement de la situation concurrentielle. Les prescripteurs -candidats, Etat, financeurs, institutions, branches professionnelles- chacun pour des raisons qui leurs sont propres et qui seraient intéressantes d'éclaircir et d'analyser dans le cadre de ce colloque, exigent des formations et titres "reconnus par l’Etat”, c’est à dire inscrits au Répertoire National des Certifications Professionnelles. La "reconnaissance" des parcours semble ainsi devenir un enjeu majeur de la formation professionnelle. Cette modification des règles du jeu a été actée par la loi n° 2014-288 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale. Les communications proposées dans le cadre de cette thématique pourront se pencher sur les enjeux de cette nouvelle règlementation pour les centres de formation, sur ses objets, son impact sur le paysage de la formation professionnelle.

En conséquence, les centres de formation s’organisent pour intégrer ce type de titres à leur catalogue en diversifiant leurs modalités d'intervention. Ils constituent des réseaux pour proposer des certifications à l’enregistrement auprès du RNCP, nouent des partenariats pour louer les droits d’accès aux titres détenus par d’autres, ou se convertissent en prestataires de service pour d’autres centres de formation lorsqu’ils peuvent proposer des compétences et des modalités de formation complémentaires ou spécifiques à un domaine, voire innovantes et complexes à mettre en œuvre pour des organismes classiques, tel que le e-learning. Quel sera le paysage de la formation dans les années à venir au regard de ces considérations ? Quel avenir à la certification si tout à chacun peut proposer une certification spécifique ? Quelle valeur d’une certification noyée dans une offre singulière au niveau national et international ? Quid des savoirs faire spécifiques qui disparaitront avec la barrière d’une demande de certification ? Comment éviter des certifications « puzzle » sans réelle cohérence car mise en place dans une logique de marché et non d’apprentissage structuré ? Mais aussi quels effets sur les apprenants et les donneurs d’ordre dans cette logique économique où payer suffit-il à « mériter » le diplôme visé ? 

 

Les approches pédagogiques et les outils de la formation

Dans un troisième temps, dans un contexte bouleversé par le développement des nouvelles technologies, on assiste à une recrudescence des recherches portant sur les outils de la formation et leur impact sur la transmission des savoirs. Le elearning, les MOOCs, génèrent de nouveaux modes d'apprentissage. Les penseurs de l'autoformation comme Pineau (1983), Galvani (1991),  Dumazedier (1993), Carré (1997) illustrent ces recherches. Dans un environnement où chacun doit construire sa place dans la société, où chacun doit devenir le maître d’œuvre de son propre projet de vie, la formation est plus que jamais un outil de socialisation. Elle doit donc prendre en compte ces évolutions et accompagner l'apprenant dans ce processus. La forme des savoirs, les stratégies d'apprentissage et la relation pédagogique (HOUSSAYE, 1988) est plus que jamais au centre des réflexions : de l'approche ternaire de la formation de Philippe Carré (CARRE et al., 1997) au tétraèdre de Faerber (2002), les TICE impactent profondément la pédagogie. 

À l’occasion des dernières Assises de l’Enseignement supérieur, la fin du cours traditionnel a été longuement évoquée. Le cours magistral ne fait que transmettre un savoir académique en maintenant les étudiants dans la passivité (Kitchen, Finch & Sinclair, 2008) et en imposant un même rythme d’apprentissage à un public hétérogène. Si les controverses ne datent pas d’hier, elles sont remises au cœur des débats par la révolution numérique à l’œuvre. Le secteur éducatif, basé sur le modèle transmissif coménien, est en proie à de profonds bouleversements. L'apprenant dispose aujourd'hui d'une infinité de sources informationnelles et peut, à tout moment, s'en remettre à ses pairs sur les réseaux sociaux ou interagir en ligne avec son référent pédagogique, lui-même acculé à une remise en question selon les prérogatives du "tiers formant" (Mœglin, 1998).

Une éducation alternative a vu le jour dans différents pays à l’instar de FUN[1], des Universités Ouvertes[2], ou de la P2PU[3] qui rencontrent un franc succès[4] comme c’est le cas pour Coursera[5]. D'aucuns y voient l'émergence d'un nouveau paradigme éducatif, d'autres _ceux-là mêmes qui s ′étaient opposés à l'informatique à l'école (Finkielkraut & Soriano, 2001) les considèrent comme un obstacle aux échanges en classe (Chaptal, 2003). Pour autant, les changements induits par les nouveaux usages du web affectent la valeur des contenus didactiques autant que les modalités de médiations elles-mêmes, laissant présager une redistribution des rôles (Pédauque & Melot, 2006). Qu’il s’agisse de la conception, de la scénarisation ou de la diffusion des contenus pédagogiques, tous les secteurs de la formation sont concernés. Dans ce paradigme, le rôle et les usages, l’accompagnement, l’apprentissage, la relation à proprement parler Enseignants / Etudiants constituent une heuristique féconde autant pour les Sciences de l’Education que pour les Sciences de l’Information et de la Communication.

Quels en sont les enjeux économiques, les usages et les stratégies pédagogiques associées ? Quel rôle peuvent-ils jouer dans les stratégies d'individualisation ? Avec ces dispositifs, nous dirigeons-nous vers une formation de plus en plus spécifique, à la carte, en fonction de la personne qui la sollicite et de son projet propre ?

En quoi les outils de la formation sont-ils impactés par la diversification ? Quel rôle jouent les NTIC dans ce contexte ? Permettent-elles de mettre en œuvre une réelle multimodalité au service de l'individualisation, transforment-ils les savoirs qu'ils sont sensés aider à transmettre ? Quelles autres compétences utiles permettent-ils de développer ? Quelle conscience avons-nous de ce potentiel, et en quoi est-il mis au service de l'apprenant ?

 

Les intervenants

La demande autour du professionnel de la formation a été d’offrir jusque récemment une maitrise de son champ d’intervention et une capacité à transmettre cette expertise. L’environnement évoluant, quels sont les demandes actuelles ? Doivent-ils développer des compétences en réponse à appel d’offre ? À la construction de parcours diplômant ? à l’utilisation habile des nouvelles technologies ? Doivent-ils se positionner dans une relation clients – fournisseur et non plus didactique ? Peut on « vendre » de la formation sans analyse de la demande, sans dispositif d’accompagnement des formés ? En quoi les métiers de la formation sont-ils impactés par cet environnement ? Quel regard peut-on porter sur l'évolution de ces métiers, tant en ce qui concerne la diversification de leurs compétences, de leurs domaines d'intervention, que ce qui touche à l'émergence de nouveaux métiers, de nouveaux acteurs ? Quels sont ces nouveaux métiers ? Comment sont-ils perçus aujourd'hui, quelle reconnaissance leur est accordée ? Comment former aujourd'hui les intervenants de demain au regard de ces considérations ?

 

Les apprenants

Dans le contexte de réforme de la formation professionnelle, de diversification des certifications, le candidat à la formation doit mener une véritable enquête pour choisir sa formation en toute connaissance de cause : au-delà du choix de la thématique qui relève d’un choix d’orientation, il doit choisir le type de certification (titre professionnel, diplôme) les modalités de formation (présentiel, semi-présentiel, e-learning, alternance, classe inversée, cours magistraux,…), le centre de formation, sa localisation… Il peut consulter le catalogue du RNCP, le Centre Inffo, les SCUIO de sa commune. Tous les publics ont-ils les moyens d’organiser une telle enquête ? En ont-ils tous les outils ? Quels seront les critères de son choix ? Sont-ils les mêmes que le financeur de la commande publique de formation ?

On peut également se demander qui sont les apprenants d'aujourd'hui ? Comment appréhendent-t-ils les bouleversements de l'environnement de la formation ? Comment s'adaptent-ils ? Le rapport au savoir est-il impacté ? Les apprenants participent-ils à ce changement, ou le subissent-ils ? 

D’autre part, comment le professionnel se positionnera lorsque la seule offre de formation sera certifiante/diplômante ? La durée et l’évaluation finale en fin de formation constitue-t-elle un critère d’attraits ou bien risque-t-elle d’effrayer le postulant ? L’organisation acceptera t’elle de financer, de laisser partir des collaborateurs pour de longues périodes en prenant le risque qu’ils reviennent diplômés avec de nouvelles demandes ?

 

 Frais d'inscription

  • Enseignant / chercheur universitaire : 50€
  • Etudiant : 30€
  • Etudiant Icademie : 20€
  • Professionnel : 80€

Les inscription pour assister au colloque sur place sont ouvertes jusqu'au 31 mai 2015.

Règlement par chèque à libeller à l'ordre d'Icademie, et à envoyer à l'adresse ci-dessous :

 

Icademie

15 Boulevard de Strasbourg

83000 Toulon

 

 

*Le colloque sera filmé, une demande de cession de droits à l'image sera remise à l'entrée à tous les participants.


[1]France Université Numérique est en France à l’initiative du Ministère de l’Education Nationale et de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche

[2] Stanford et le MIT aux États-Unis, Futurelearn en Angleterre, et UOH (l’Université Ouverte des Humanités réunit 24 universités françaises, une École Normale Supérieure, une Université belge et une université camerounaise).

[3] Le Peer to peer University est un projet d’éducation ouverte qui organise l’apprentissage en dehors des murs de l’institution académique ; les apprenants bénéficient d’un réseau social dédié, OpenStudy, qui leur permet d’interagir entre eux sur des thématiques de cours.

[4] « The Year of the MOOC », article du New York Times publié dans les colonnes d’Education Life, donne la mesure du phénomène : Coursera a atteint le million d'usagers en seulement trois mois quand même Facebook a du en attendre dix !

[5] Coursera ou Udacity ont adopté des fonctionnalités similaires pour proposer de courtes séquences pédagogiques vidéo et un forum d'entraide pour les étudiants d'une classe virtuelle. C'est aussi le principe d'edX du MIT mais en open source et à à but non lucratif.

   

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